L'homme perplexe

8Mar/18Off

Politiques de référencement et de mise en avant des contenus dans les magasins d’applications

Au-delà de la question du traitement des contenus sensibles, les magasins d’applications jouent aujourd’hui un double rôle dans la mise à disposition des contenus sur smartphone. D’une part, ils jouent un rôle de référencement, à l’occasion duquel ils peuvent opérer une sélection, avec différents motifs de restriction (lutte contre la fraude, respect des droits de propriété, protection de l’intégrité du matériel, etc.), dont certains peuvent du reste être complètement légitimes. D’autre part, au sein des contenus référencés, les magasins ont une fonction de moteur de recherche, ce qui signifie qu’ils appliquent inévitablement des classements. Or tout classement contient une part de subjectivité qui, même bien intentionnée, ne peut être compatible avec un objectif de neutralité. En conséquence, l’ouverture d’internet est remise en cause par les terminaux s’il n’est pas possible de contourner le magasin d’applications lié au système d’exploitation, puisque les utilisateurs n’ont pas d’autre possibilité, pour choisir les applications qu’ils souhaitent télécharger, que de passer par le prisme du moteur de recherche affilié au magasin. De manière générale, les politiques de référencement et de mise en avant des contenus dans les magasins d’applications peuvent manquer de transparence. En effet, les politiques éditoriales des magasins d’applications ne sont pas toujours documentées et pourraient reposer sur des critères contraires à l’objectif d’un internet ouvert. Les effets potentiels de telles politiques pourraient être particulièrement sensibles lorsque le système d’exploitation du terminal ne permet pas d’installer de magasin d’applications alternatif, ou de télécharger des applications en dehors du magasin. Une telle contrainte est particulièrement visible dans les univers intégrés comme celui d’Apple ou de certaines consoles de jeux. Outre les justifications techniques affichées, telles que la sécurité et l’intégrité du terminal, ou la protection des données personnelles, il est possible que certaines limites résultent en réalité de choix commerciaux : les magasins d’applications peuvent privilégier des services verticalement intégrés en entravant le bon fonctionnement des applications concurrentes, qu’il s’agisse de musique, de vidéo ou de presse. L’entrave ne passerait pas nécessairement par un blocage réel des applications visées : elle pourrait prendre la forme d’une durée d’homologation allongée pour certaines applications candidates à l’accès à un magasin d’applications. L’Arcep, qui participe au financement d’une application de détection des infractions à la neutralité d’internet, appelée « Wehe » et développée par la Northeastern University, a été elle-même confrontée au problème du référencement des applications. Une première version de cette application a été proposée pour intégrer l’App Store d’Apple en janvier 2018, mais celle-ci s’est vu opposer un refus, sans qu’il soit possible de voir en quel point cette application contrevenait aux conditions d’usage de l’App Store. Si l’application a finalement pu être intégrée à l’App Store après réclamation, le cas illustre les difficultés auxquelles peut être confronté un simple développeur, qui n’aurait pas eu les mêmes moyens que l’Arcep pour faire valoir ses droits.

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